
Le fort des Dunes est un ouvrage fortifié du XIXe siècle bâti sur la commune de Leffrinckoucke à 6 km à l’est de Dunkerque. Construit dans le cadre du système Séré de Rivières, il subira plus tard diverses modifications et sera intégré dans la ligne Maginot. Utilisé lors de la bataille de Dunkerque puis sous l’occupation allemande, il abrite désormais un centre mémoriel dédié à l’Opération Dynamo, en Juin 1940, et se visite.
Depuis que j’avais découvert, durant l’hiver 1991, les blockhaus et les restes de la batterie de Leffrinckoucke, au nord de la jetée de Malo-les-Bains, tout près de Dunkerque (Nord), je n’avais cessé à chaque voyage de revenir sans cesse au milieu de ces ruines. Pour méditer ou pour rêver d’Histoire.
J’avais quelquefois poussé vers l’intérieur des terres, là où la dune s’adoucit pour parcourir, au pas de course les tranchées et les casernements bétonnés, vestiges en déshérence de la dernière guerre mondiale. À l’époque où je pratiquais ces visites, les lieux étaient connus pour servir, à l’occasion, de site d’entrainement pour des groupes paramilitaires nostalgiques du Grand Reich… un photographe d’une grande agence française les avait même suivis et photographiés dans l’exercice de leurs activités.
Après les cimetières, le fort
Une plaque, apposée à l’entrée du fort, rend hommage à ce chef ainsi qu’aux hommes tombés à ses côtés, durant les premières journées de juin 1940. Une autre plaque la jouxte, dédiée « À la mémoire du Lieutenant-colonel Le Notre commandant les forces terrestres et aériennes de la première Armée des officiers, sous-officiers et soldats des F.T.A. tombés à leur poste de combat en ces lieux le 3 juin 1940« . Et pour en finir avec les hommages, une dernière plaque est installée à l’intérieur du fort, rappelant au visiteur le souvenir du sacrifice des gendarmes de la Prévôté de la 12e DIM morts pour la France le 3 juin 1940.

Mais venons en au fort ! Construit en 1878, le il fait partie de l’ensemble de fortifications érigé sur ordre du général Séré de Rivières, à la suite de la défaite de la France contre la Prusse en 1871 afin de créer une ligne de défense autour de la France et empêcher toute nouvelle incursion prussienne. Dans ce cadre et plus particulièrement dans celui de la protection des principaux ports français, le fort avait la charge de défendre le port de Dunkerque d’une attaque venant de l’est. Pièce maîtresse de la stratégie de défense du territoire et de l’agglomération dunkerquoise, il était, à l’époque de sa construction, le seul fort terrestre de type « Séré de Rivières » construit sur le littoral.
La batterie côtière de Zuydcoote, située à 800 mètres au nord du fort, ne lui fut adjointe qu’en 1879 en tant que position de soutien.
Séré de Rivières à la plage
Au printemps 2022, j’étais parti quelques semaines à Malo, en résidence d’écriture pour mettre le point final à un ouvrage sur Rimbaud. Je m’étais bien promis de ne céder en aucun cas à mes « vices » historiques et de ne pas me laisser attirer par les traces que les guerres ont laissé sur la côte, entre Dunkerque et Bray-Dunes. Et puis une malheureuse visite au Mémorial de l’Opération Dynamo m’avait fait replonger dans l’histoire et, de Nécropole nationale en petit cimetière militaire j’avais remonté le temps, visitant en alternance, et au gré de mes errances nostalgiques, les défunts des deux conflits mondiaux. C’est en approchant de la Nécropole du Fort des Dunes que j’avais découvert l’existence de ce fameux fort, sans encore – mea maxima culpa – connaître l’existence du général Séré de Rivières.
Cent quatre-vingt dix tombes individuelles y abritent les restes de corps majoritairement français tandis qu’une fosse commune – monument ossuaire – renferme les restes de vingt-cinq soldats inconnus, Français et tchèques. Le Général Gaston Janssen, Commandant de la 12e division d’infanterie motorisée (DIM), tué le 2 juin 1940 lors des bombardements aériens du fort, repose parmi ses hommes.
Installé sur le goulet de Bray-Dunes formé du cordon dunaire et de polders primitifs, il était proche du canal Nieuport-Dunkerque, de deux routes d’importance et de la voie ferrée venant de la frontière belge. 40 000 000 briques furent nécessaires à son édification, toutes fabriquées sur place, permettant, par leur copuleur sable, de fondre l’ouvrage dans le paysage. Adossé à la dune qui le recouvrait partiellement, se confondant avec le sable comme par mimétisme, je n’avais jamais eu la moindre chance de le débusquer lors de mes pérégrinations passées, côté mer.
Une place d’importance
À l’heure de sa construction, le fort pouvait accueillir 13 officiers, 22 sous-officiers et 416 soldats. Il se composait d’une caserne destinée aux hommes de troupe, d’un pavillon réservé aux cadres, ainsi que d’une boulangerie, d’un abattoir, d’un magasin à poudre et de magasins annexes, d’une infirmerie et d’une prison. Il était également doté de plusieurs puits et d’une citerne. Un deuxième magasin à poudre sera bâti en 1898, à quelques centaines de mètres au sud-ouest du fort, afin de stocker et d’assembler les nouveaux types de projectiles d’artillerie.
Entouré d’un fossé défendu par une caponnière simple, une caponnière double et une caponnière double de gorge que complétait un pont-levis désormais disparu. Tout comme le porche monumental percé dans les murs d’escarpe. Passé le pont qui enjambe le fossé, et que flanquent deux guérites blindées datant de la Deuxième guerre, on pénètre dans le fort par un tunnel en bien mauvais état. C’est que le fort a souffert des bombardements aériens de 1940 et 1944, preuve en est l’énorme trou percé dans la voûte, qui laisse voir le gris du ciel.
Le tunnel d’accès et la voûte crevée par les bombes.
Visiter le fort, architecture et curiosités
Une fois sorti du tunnel, le visiteur se trouve dans une cour aux dimensions impressionnantes. En face de lui, un bâtiment à un étage – le casernement -, muraille de grosses briques beige, semblables à des pierres de taille, surmontée d’une coursive. De chaque côté un tunnel voûté donne accès aux autres bâtiments du fort et le visiteur peut à son aise passer des cours herbeuses aux superstructures du fort d’où il aperçoit d’un côté la mer, et de l’autre le polder surmonté du haut château d’eau rayé de bleu et de blanc de Leffrinckoucke.
Parmi les curiosités du fort – mais bien postérieures au général Séré de Rivières -, il y a ce curieux bunker implanté par l’occupant allemand dans le cadre du Mur de l’Atlantique, sans doute afin de renforcer le système défensif vieillissant.
Couvert de « Vermicelles « de béton afin de le camoufler, il porte une amusante inscription, sculptée à l’envers par le maçon en charge des travaux qui avait trouvé plaisant de faire un pied de nez à l’occupant en inscrivant son prénom et celui de sa chérie : Robert et Maria. Prenez le temps de la chercher…
Visite au musérial
Rénové en 2020, le rez-de-chaussée du casernement propose un espace découverte où le visiteur pourra découvrir, à travers une scénographie conçue pour valoriser la mémoire des lieux. Sur 600m2, il pourra découvrir six salles d’immersion où se côtoient vidéos, maquettes, et panneaux interactifs qui retrace l’histoire du territoire « de Turenne à Dynamo ». Cinq grands thèmes sont évoqués qui permettent de mieux comprendre la Flandre stratégique, le concept de défense de Séré de Rivières et la vie du fort. Un espace particulier est consacré à l’Opération Dynamo ainsi qu’au rôle du fort dans la 2e Guerre mondiale, mais l’avenir est également mis à l’honneur qui envisage l’intégration de la mémoire historique dans un cadre naturel à protéger.


Infos pratiques
Adresse : chemin du Fort, 59495 Leffrinckoucke
Le Musérial est ouvert du 4 mars au 31 octobre 2025, du mardi au dimanche de 10h à 18h.
Tarifs 2025
Visite libre des expositions et circuit extérieur avec audioguide (durée moyenne : 1h30) :
Adulte : 7,00 €
7 à 18 ans / étudiant : 3,50 €
Moins de 7 ans : gratuit
Visite guidée du site sur réservation (durée moyenne : 1h15 de visite guidée + 45 minutes de visite libre dans le musée) :
Adulte : 8,00 €
7 à 18 ans / étudiant : 4,00 €
Moins de 7 ans : gratuit
Billet jumelé avec le Musée Dunkerque 1940 : 10,00 €
05 05 2025 – 5 /
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